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Le numérique dans tous ses États

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Les transcriptions sont disponibles en bas de la page

Épisode 1 : L’utilisation de l’intelligence artificielle et l’automatisation des services publics

La question de l’IA fait désormais partie intégrante du débat public. Qu’est-ce que l’IA aujourd’hui au sein des administrations publiques ? Quelle est son histoire, ses applications et ses perspectives d’avenir ? Dans cet épisode, Guillaume Avrin, coordinateur de la stratégie nationale pour l’IA et Pierre-Étienne Devineau, lead data scientist à la DINUM sont nos témoins.

Disponible le 11/04/24

Épisode 2 : Faire passer à l’échelle une startup d’État : l’exemple de PIX

Les startups d’États représentent une nouvelle approche audacieuse et innovante de la transformation de l’administration publique. Ces initiatives émergentes visent à repenser la manière dont les services publics sont conçus, développés et déployés. Dans cet épisode, Marie Bancal directrice des partenariats chez PIX et Frédérique Cousin ex DGNUM du ministère des Armées, sont nos témoins.

Disponible le 27/05/24

Épisode 3 : Justice et numérique : la modernisation de la procédure pénale

Le ministère de la Justice s’est engagé dans une ambitieuse restructuration de ses modes de fonctionnement et le programme procédure pénale numérique (PPN) s’inscrit dans cette révolution. Dans cet épisode, Haffide Boulakras, ex directeur du programme PPN et Charlène Wampouille, ex chargée de mission du développement de la PPN, sont nos témoins.

Disponible le 03/06/24

Épisode 4 : Au service d’un numérique éco-responsable

Au sein des administrations publiques, le numérique écoresponsable ou sobriété numérique ont pris un poids considérable. Dans cet épisode, le Colonel Olivier, membre du bureau de la stratégie en charge des questions de sobriété numérique au sein du ministère des Armées et Thierry Lochon, directeur du programme numérique et écologie au sein du ministère de la transition écologique, sont nos témoins.

Disponible le 10/06/24

Épisode 5 : Relation à l'usager "dites-le nous une fois"

Plongeons-nous dans les mécanismes du programme « dites-le nous une fois », et de manière plus générale, sur les relations entre administration et usagers. Dans cet épisode, Marion Loustric, cheffe du programme « administration pro-active » et Joffrey Renaux, pilote de l’observatoire « démarches essentielles » entre 2021 et 2023, sont nos témoins.

Disponible le 17/06/24

Épisode 6 : Retour d'expérience d'une collectivité territoriale sur le numérique

Pour améliorer la communication avec les citoyens, optimiser les processus internes ou favoriser l’innovation, chaque collectivité territoriale a ses propres objectifs et aspirations en terme de transformation numérique. Dans cet épisode, Caroline Zorn, vice-présidente de l’eurométropole de Strasbourg et Maria Cotora, directrice du programme transformation numérique des territoires, sont nos témoins.

Disponible le 24/06/24

Épisode 7 : L'apport du numérique dans la formation

Le numérique s’est imposé comme outil pédagogique incontournable, mais à quoi ressemble cette révolution numérique de la formation au sein des administrations publiques ? Génaël Valet, directeur du programme interministériel de formation Mentor et Stéphane Foltzer, directeur de l’Académie du numérique de la défense de 2020 à 2023, sont nos témoins.

Disponible le 01/07/24

Épisode 8 : L'open data et les données de transport

Dans le domaine de la mobilité, l’open data offre de nombreux avantages pour notamment faciliter le transport des usagers et rendre les transports en commun plus accessibles. Dans cet épisode, Romain Tales en charge des sujets de transformation numérique au sein de Numéricité et Antoine Augusti, ingénieur pour la plateforme transport.data.gouv.fr, sont nos témoins.

Disponible le 08/07/24

Épisode 9 : La transformation numérique publique au service des nouvelles modalités de travail

Près de 70% des salariés disent comprendre ce que le terme « transformation numérique » implique. Quelle sont donc les grandes tendances sur les nouvelles modalités de travail, qui se dégagent au sein des administrations ? Dans cet épisode, Thierry Pires, chef du laboratoire d’innovation d’usages et design de services au sein de la DTPM (délégation à la transformation et à la performance ministérielle) au sein du ministère des Armées, est notre témoin.

Disponible le 15/07/24

Transcriptions

Awad Daniel : Transformation digitale, transition numérique ou même quatrième révolution industrielle.

Derrière ces termes, se cache une réalité pour l'ensemble de nos entreprises, de nos administrations et pour chacun d'entre nous.

Le numérique dans tous ses États : c'est une série de podcasts que je vous propose pour mieux appréhender la transformation numérique publique, à travers des histoires et des témoignages concrets des agents publics qui la vivent au quotidien.

Je suis Awad Daniel : suivez-moi et entrons dans le monde numérique.

Souvent fantasmée, à travers les œuvres cinématographiques et littéraires, la question de l'IA fait aujourd'hui partie intégrante du débat public.

Midjourney et ChatGPT, inconnus il y a moins d'un an, sont aujourd'hui incontournables et posent de nombreuses questions sur leur potentiel et leurs dangers.

Et au sein des administrations publiques, l'IA est devenue un outil puissant pour aider les administrations à améliorer l'efficacité de leurs services, à mieux répondre aux besoins des citoyens et à prendre des décisions éclairées. Qu'est-ce que l'IA aujourd'hui, au sein des administrations publiques ? Quelle est son histoire, ses applications et ses perspectives d'avenir ? Guillaume Avrin, coordinateur de la stratégie nationale pour l'intelligence artificielle, et Pierre-Etienne Devineau, Lead Data Scientist à la Direction interministérielle du numérique, se joignent à moi pour répondre à ces questions.

Le numérique dans tous ses États.

Awad Daniel : Guillaume, Pierre-Etienne, pour lancer cet épisode j'aimerais avoir votre point de vue : Quel regard est-ce que vous portez sur le rapport des administrations à l'intelligence artificielle ?

Guillaume Avrin : Bonjour Awad, merci beaucoup pour l'invitation à ce podcast. Mon sentiment depuis que j'ai pris mes fonctions, c'est qu'extrêmement rapidement, les administrations se sont mobilisées sur l'intelligence artificielle et ses nouveaux enjeux. Et je pense que cette appropriation rapide à l'IA de chaque individu, en fait, ça s'est vraiment traduit au sein des administrations déjà, par un intérêt grandissant, important, sur le sujet, la volonté de pouvoir déployer ces technologies pour différents métiers, différents services.

Pierre-Etienne Devineau : C'est une conscience à, à peu près tous les niveaux, du fait que les outils numériques sont de plus en plus puissants, à condition d'être de mieux en mieux pensés pour l'utilisateur. Aujourd'hui, tous les agents publics sont des utilisateurs des technologies numériques dans leur vie propre et les services se sont dotés en logiciels spécifiques.

Donc tout l'enjeu maintenant, c'est de venir proposer de nouvelles solutions utilisant les dernières technologies quand elles peuvent aider, mais proposer des solutions vraiment pensées sur-mesure pour le service administratif.

Awad Daniel : Plus concrètement, quelle est l'histoire de l'IA au sein des administrations ces dernières années ?

Pierre-Etienne Devineau : En fait, l'intelligence artificielle est assez ancienne au sein des administration en réalité, mais sur des périmètres bien précis. Donc, si on fait peut-être une nuance entre science des données et intelligence artificielle : l'intelligence artificielle ça va être la finalité d'automatiser des tâches ou des métiers et les sciences de données, ça va être des manières d'acquérir des données, de les analyser, de les compulser pour du travail administratif. Ce qui est nouveau sur l'utilisation de l'intelligence artificielle : pour orienter l'action publique. Et notamment orienter, par exemple, soit les contrôles du fisc, mais d'orienter aussi, dans une certaine mesure, permettre aux personnes de découvrir qu'elles sont ayants droit à des aides.

Guillaume Avrin : Le spectre de ce qui est aujourd'hui couvert par l'IA, au sein des administrations, s'est extrêmement élargi. En fait, avec cette acculturation extrêmement rapide à l'intelligence artificielle ces derniers mois, finalement, on se rend compte de tout le potentiel que ça peut avoir de déployer largement ces systèmes intelligents dans nos métiers. C'est vrai que c'est en train de se répandre très largement.

Awad Daniel : Guillaume, partant de ce contexte, quel est le rôle de la stratégie nationale pour l'intelligence artificielle ?

Guillaume Avrin : Au sein de la stratégie nationale pour l'IA, on a une gouvernance qui est mise en place qui est une gouvernance interministérielle, avec un comité de pilotage et un comité stratégique qui se réunissent une fois par mois.

Le comité de pilotage, qui a plutôt vocation à fixer les grandes orientations de l'État en intelligence artificielle, à faire également de la synchronisation et identifier les synergies possibles entre les différents projets IA portés par les différents ministères. Il y a huit ministères, les huit principaux ministères concernés par l'intelligence artificielle, qui sont représentés au sein de ce comité de pilotage et de ce comité stratégique.

Awad Daniel : Pierre-Etienne, parlons justement de ces projets IA. Qu'est-ce qui a pu être développé ces dernières années pour assister les agents publics ?

Pierre-Etienne Devineau : On développe des outils d'intelligence artificielle pour les agents publics eux-mêmes, pour leur permettre de gagner du temps et de pouvoir se concentrer sur le cœur de leurs missions. Donc, Albert, c'est un logiciel qui essaye de répondre à des questions sur les démarches administratives, sur la réglementation. Donc ce logiciel va examiner un ensemble de textes juridiques, de vulgarisation sur les démarches qui s'adressent aux citoyens. Et le but, c'est de mettre cet outil entre les mains des agents publics.

Awad Daniel : Et lorsqu'on est agent public, justement, comment est-ce qu'on accueille ces innovations ?

Pierre-Etienne Devineau : Il y a de la curiosité et de l'appréhension et, en fait, c'est normal puisque ces outils d'intelligence artificielle, en particulier depuis un an où on parle beaucoup d'outils comme ChatGPT, sont présents dans notre imaginaire collectif.

Ce qui veut dire que, en fait, il y a des représentations mentales qui sont liées à l'intelligence artificielle, sur l'automatisation des métiers, par exemple, ce qui est pas du tout notre but en soi quand on développe des logiciels pour les administrations.

Et donc il faut réussir à, nous-mêmes, nous éloigner de cette image.

En fait, la première tentation pour nous, c'est de se dire : on estime qu'un outil, que tel ou tel modèle qui existe dans l'industrie est utile dans notre vie quotidienne et qu'en tant que tel, il sera utile pour les agents publics dans leurs missions. Et ce n'est pas forcément vrai.

Awad Daniel : Qu'est-ce que vous avez pu mettre en évidence à travers vos recherches ?

Pierre-Etienne Devineau : Une enquête de terrain nous a montré que cet usage d'avoir ce moteur de recherche un petit peu omniscient, ce n'est pas ce qui aide réellement les agents qui ont des français face à eux, qui ont besoin d'être accompagnés dans une démarche. Donc, on a dû changer notre fusil d'épaule et partir vraiment de ce qui a été observé, donc de la manière dont rendez-vous est conduit, pour proposer un logiciel sur mesure dont l'interface n'est pas "Pose une question et je te répondrai" mais plutôt "Vous allez avoir dans dix minutes face à vous une française ou un français. Voici l'ensemble des documents qu'on peut vous trouver, vous fournir en amont du rendez-vous qui pourrait être pertinent pour ce rendez-vous". Aujourd'hui, on entreprend ce travail, sur le cas des démarches administratives mais en réalité, il est vrai dans, je pense, un peu toutes les sphères professionnelles de l'État.

Awad Daniel : Guillaume, qu'est-ce qui permettra de briser les derniers obstacles auxquels l'intelligence artificielle fait face aujourd'hui ?

Guillaume Avrin : On parviendra finalement à accélérer les stratégies de développement de nos acteurs, de notre écosystème, à la fois sur la partie de développement et la partie intégration de l'IA dans l'entreprise, que si on arrive au sein de l'action publique à articuler de manière convenable à la fois la subvention qui peut avoir lieu dans le cadre de France 2030, mais également avec la commande publique et l'investissement en capital. Et j'ai vraiment le sentiment que si on parvient à mettre au service des administrés des IA qui sont performantes et respectueuses des droits fondamentaux, je pense que ce sera l'un des plus gros accélérateurs de la diffusion de l'IA dans notre économie, parce que c'est vraiment cela aura le rôle d'exemple. Je pense que ça finira de lever les dernières barrières concernant notre appréhension des limites ou des risques associés au déploiement de ces technologies.

Awad Daniel : Pierre-Etienne, à quel type d'innovation IA doit-on s'attendre dans un futur proche ?

Pierre-Etienne Devineau : Je pense vraiment qu'on va aller de plus en plus vers des intelligences artificielles spécialisées qui auront vu une bonne partie des connaissances écrites sur un sujet et qui seront à même de venir restituer et trouver rapidement la bonne information sur ce sujet. Et ensuite, il y a d'autres IA qui voient le jour : notamment en termes d'analyse d'images aériennes. La DGFIP a travaillé sur les images aériennes pour détecter, en l'occurrence, des piscines et vérifier que les piscines étaient déclarées. L'ensemble des supports qui existent, donc des supports textuels, des images, qui sont aujourd'hui travaillées par les administrations, peuvent être en partie aidées par des IA. Donc le but, cela ne sera pas, pour moi, de venir remplacer des métiers ou transformer trop profondément des métiers, mais de venir aider à certaines tâches pour vraiment, en quelque sorte, utiliser l'intelligence artificielle comme un assistant auquel l'intelligence humaine vient déléguer volontairement certaines tâches.

Awad Daniel : Merci à vous deux d'avoir participé à ce podcast. Pour terminer cet épisode, j'aimerais avoir votre opinion. Quel conseil est-ce que vous donneriez à des porteurs de projets de transformation numérique public ?

Guillaume Avrin : Je pense que la toute première étape, ce serait de se rapprocher de la Dinum et de la DITP. Parce que je pense que c'est vraiment nos administrations, c'est vraiment les porteurs de cette transformation publique par l'IA.

De se rapprocher de la coordination nationale pour l'IA, parce que nous, on voit passer énormément de projets. On a, par exemple une assez bonne connaissance des bases de données qui sont disponibles.

Pierre-Etienne Devineau : Alors, écoutez vos utilisateurs, allez les rencontrer, essayez de les faire parler, essayez de comprendre ce qu'ils ne vous diront pas d'eux-mêmes. Et donc, le plus sûr pour ça, à moins d'être un spécialiste de ce genre de métier, c'est de se faire aider.

Nous, on s'est fait aider par des designers, en tout cas de se faire aider par des gens qui ont l'habitude de commencer par observer un processus avant de proposer une solution.

Ce podcast est produit par l'Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la Direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.

Awad Daniel : Transformation digitale, transition numérique, ou même quatrième révolution industrielle.

Derrière ces termes, se cache une réalité pour l'ensemble de nos entreprises, de nos administrations et pour chacun d'entre nous. Le numérique dans tous ses États : c'est une série de podcasts que je vous propose pour mieux appréhender la transformation numérique publique, à travers des histoires et des témoignages concrets des agents publics qui la vivent au quotidien.

Je suis Awad Daniel : suivez-moi et entrons dans le monde numérique.

Les startups d’Etat représentent une nouvelle approche audacieuse et innovante de la transformation de l’administration publique. Inspirées par les méthodes agiles et entrepreneuriales, ces initiatives émergentes visent à repenser la manière dont les services publics sont conçus, développés et déployés.

Dans cet épisode, découvrons la startup PIX : en quoi répond-elle à un besoin des administrations sur les questions numériques ? Comment s’est-elle déployée ?

Marie Bancal, directrice du partenariat du développement et du juridique chez PIX, ainsi que Frédérique Cousin de la direction générale du numérique en charge de l’acculturation du personnel du ministère des Armées, viennent répondre à nos questions.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Pour commencer cet épisode, Marie Bancal, de quel constat part la création de PIX ?

Marie Bancal : Il y avait un constat partagé sur la nécessité de mieux former sur les compétences numériques tout au long de la vie. Et de ce constat est née l’idée justement de se dire si on veut former, il faut savoir évoluer, il faut savoir sur quoi on doit former, et on a besoin d’un référentiel partagé à tous. Donc un des éléments de départ de PIX c’est de dire : sur ce sujet des compétences numériques, on doit décloisonner les approches. On ne peut pas l’aborder d’une façon spécifique à l’école, puis à l’université, puis dans le monde professionnel. Les compétences numériques c’est profondément transverse et on a besoin de créer un élan national. Et pour créer cet élan national, il faut qu’on se retrouve autour d’une grammaire commune des compétences numériques, qu’on se mettent d’accord sur ce dont on parle quand on parle des compétences numériques, et on va faire la certification PIX qui va avoir de la valeur pour tous parce qu’elle sera utilisée et reconnue par le monde professionnel, et donc qu’elle aura de l’intérêt pour le monde éducatif.

Awad Daniel : Justement, Frédérique Cousin, ces enjeux de l’acculturation au numérique ce sont des problématiques qu’on retrouve également au ministère des Armées.

Frédérique Cousin : C’est justement le défi qu’on avait à relever et sur lequel on a essayé de pouvoir mesurer le niveau de culture numérique de façon à pouvoir, en fonction des profils, construire des plans d’action et de formation qui étaient adaptés à chacun. Et c’est là qu’on voyait bien qu’il nous manquait un outil, et c’est là que toutes nos recherches nous ont conduites sur le chemin de PIX.

Marie Bancal : L’idée de départ de PIX c’est de dire : pour accompagner la montée en compétences numériques de l’ensemble de la population, il va falloir d’abord bien évaluer où on est collectivement et individuellement, pour qu’ensuite l’appareil de formation puisse se mettre en place et in fine on va reconnaitre cette acquisition de compétences en délivrant une certification.

Benjamin Marteau était vraiment l’intrapreneur au sens des startups d’Etat : c’est-à-dire l’agent public qui à un moment donné est venu avec une idée et qui a été accompagné par l’écosystème des startups d’Etat pour développer cette idée. Assez vite, il y a une petite équipe qui s’est constituée autour de lui avec des gens qui venaient de l’enseignement scolaire, de l’enseignement supérieur et du monde professionnel. Moi, je suis intervenue plutôt sur le volet structuration du projet : quel modèle économique, quel modèle de gouvernance et comment on allait donner de la viabilité à ce projet.

Awad Daniel : Imaginons que je suis un agent public, la plateforme PIX comment est-ce que ça fonctionne ?

Marie Bancal : Il y a deux modes d’accès sur la plateforme PIX, il y a un mode d’accès grand public où on peut gratuitement accéder à des tests et découvrir le référentiel. En milieu professionnel, ce sont souvent des tests sur-mesure qui sont proposés par les employeurs pour qu’ils soient les plus adaptés à la situation professionnelle des agents. On rend trois services en fait sur la plateforme : il y a un service d’évaluation pour situer individuellement et collectivement la maitrise des compétences numériques d’un individu ou d’un groupe ; il y a un service qui vise à accompagner la montée en compétences numériques, donc on va trouver des contenus apprenant sur la plateforme directement, et qui sont proposés spécifiquement en fonction de ce qui est maitrisé ou pas par la personne qui a passé les tests ; et puis, il y a un troisième service qui est la valorisation des compétences acquises, cette valorisation elle peut prendre une forme assez souple sous la forme de délivrance de badge. Ces badges ils sont d’ailleurs définis souvent par l’employeur qui dit quelles sont les compétences nécessaires à acquérir et ça nous permet de définir des badges.

Et puis, il y a une forme de valorisation beaucoup plus forte qui est la certification. La certification PIX elle est reconnue par l’Etat et le monde professionnel, on la passe en conditions un peu d’examen surveillé etc. et c’est ça qui a une valeur sur un CV à l’extérieur. Nous on essaie de concevoir des parcours avec les employeurs qui sont autour de 45 minutes, par contre ce n’est pas forcément un seul parcours, le référentiel il est assez vaste, les sujets numériques ils sont nombreux, on trouve des sujets liés à la cyber sécurité, à la maitrise de la donnée, aux pratiques collaboratives, aux outils un peu plus classiques bureautiques ect.

Donc il y a beaucoup, beaucoup de choses à explorer, et souvent ce qu’il se passe c’est qu’il y a plusieurs parcours qui sont proposés aux agents. Par contre, on essaie de faire en sorte que l’expérience sur un parcours reste dans un laps de temps qui permette de maintenir l’attention et la motivation.

Awad Daniel : Frédérique, revenons un peu en arrière sur le terme de « startup d’Etat », PIX en est une, mais concrètement qu’est-ce que c’est une startup d’Etat ?

Frédérique Cousin : Finalement, un organisme qui n’existait pas avant, qui n’est pas une organisation administrative traditionnelle mais qui n’est pas non plus complétement dans le monde privé. C’est un objet hybride entre les deux et qui quelque part est une entité de l’administration, mais qui adopte les méthodes des startups et la culture startup pour avancer rapidement, avec agilité et faire justement des produits a minima qui sont déjà viables, qui montrent que ça peut exister et qui nourrissent ces produits (qui sont vraiment minimalistes) de nouvelles fonctionnalités au fil du temps et des besoins des usagers.

Marie Bancal : Il y a un principe qui est assez fort au début, qui est que tous les projets qui sont lancés ne vont pas forcément perdurer, mais qu’il faut leur donner un environnement pour commencer à se développer. Trouver des solutions à un problème concret c’est ça en fait le principe de startup d’Etat.

Awad Daniel : Les premiers échanges avec PIX se sont déroulés en 2019 : comment ça se passe ces premiers contacts, ces premiers essais ?

Frédérique Cousin : Les premiers échanges, en fait, on se dit on va essayer déjà avant de voir autre chose. Nous c’est pareil, eux en startup ils font de l’A/B testing, ils n’arrêtent pas d’essayer des solutions, nous on était un peu dans cette disposition de vouloir aussi essayer et là-dessus arrive le covid donc l’essai a été assez particulier et ne s’est pas forcément déroulé comme on l’avait imaginé.

Marie Bancal : C’est sûr que le covid a pas mal perturbé les plans sur les premiers déploiements et il y avait cette logique au ministère des Armées de se dire « bon bah finalement les gens ont du temps peut-être et donc ils vont pouvoir utiliser leur temps pour aller sur PIX ». Sauf qu’on se lève rarement le matin en se disant qu’on va passer deux heures sur PIX.

Ce dont on se rend compte, c’est qu’on a vraiment besoin de construire des stratégies de déploiement et on ne veut pas juste jeter en pâture des propositions de formation et voir qui vient. Il faut vraiment structurer une approche avec des cibles et des parcours adaptés.

Awad Daniel : Marie, aujourd’hui est ce qu’on peut se dire que les objectifs que vous vous étiez fixés au départ ont été atteints ?

Marie Bancal : Dans les objectifs initiaux il y avait de dire : on doit se déployer dans l’ensemble de l’enseignement scolaire, on doit être au service du fait de donner un peu leur lettre de noblesse aux compétences numériques dans l’enseignement scolaire. C’est chose faite aujourd’hui, l’ensemble des élèves de la classe de cinquième à la classe de terminale vont rencontrer PIX à un moment donné et passer deux fois la certification (en classe de troisième et en classe de terminale). On a quatre millions d’élèves qui vont sur la plateforme tous les ans donc on est vraiment sur un déploiement très massif.

Frédérique Cousin : On a effectivement pu exercer dans un cadre assez librement, on a pu du coup (grâce à leurs produits et à leur super référentiel) développer des parcours sur-mesure aux entités du ministère. Aujourd’hui on a plus de 90 sphères PIX qui sont actives dans le ministère, l’objectif est vraiment atteint de notre côté et on se donne comme objectif de poursuivre ce travail ensemble.

Awad Daniel : Dernière question que j’ai envie de poser à vous deux : quels conseils vous donneriez à des porteurs de projets de transformation numérique publique ?

Frédérique Cousin : J’ai envie de reprendre une phrase que Jean Monnet (donc le bâtisseur de l’Europe) aurait dit à la fin de sa vie : «si j’avais su, j’aurais commencé par la culture ». Sans socle culturel commun, sans vocabulaire partagé et vocabulaire riche et suffisant, on ne peut pas nourrir la pensée, on ne peut pas penser la transformation et du coup on risque de la subir plus que de la vivre et de la construire.

Marie Bancal : Le pire ennemi de l’innovation c’est de commencer à imaginer tout ce qui pourrait empêcher que la solution voit le jour. C’est quelque chose qui peut très vite intervenir, notamment quand on est dans un environnement public, on se dit « non mais là ça ne va pas être possible, c’est trop compliqué, ça voudrait dire qu’on va changer des textes etc. » Oui mais en fait, les textes ça se change, les gens ça se convainc, les ressources ça se trouve donc il vaut mieux se focaliser sur ce qu’on a envie de faire et les moyens d’atteindre la solution plutôt que sur les freins potentiels.

Ce podcast est produit par l’Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.

Awad Daniel : Transformation digitale, transition numérique, ou même quatrième révolution industrielle.

Derrière ces termes, se cache une réalité pour l'ensemble de nos entreprises, de nos administrations et pour chacun d'entre nous. Le numérique dans tous ses États : c'est une série de podcasts que je vous propose pour mieux appréhender la transformation numérique publique, à travers des histoires et des témoignages concrets des agents publics qui la vivent au quotidien.

Je suis Awad Daniel : suivez-moi et entrons dans le monde numérique.

Le ministère de la Justice s’est engagé dans une ambitieuse restructuration de ses modes de fonctionnement et le programme procédure pénale numérique s’inscrit dans cette révolution.

Comment s’est-elle déployée au sein des administrations et quelles sont les perspectives d’avenir ? Haffide Boulakras, ancien directeur du programme procédure pénale numérique, et Charlène Wampouille, ancienne chargée de mission du déploiement de la PPN viendront répondre à ces questions.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Haffide Boulakras, vous êtes l’ancien directeur du programme procédure pénale numérique. Pour commencer cet épisode, quelle a été la genèse de ce programme ?

Haffide Boulakras : Ça a commencé surtout en janvier 2018 par une promesse, ou en tout cas par une déclaration présidentielle. Le Président de la République se rend à l’occasion de l’audience de rentrée solennelle de la Cour de Cassation et annonce qu’en quatre ans, la procédure pénale sur le territoire national devra connaitre une transformation qui est une transformation numérique. On a pu commencer les expérimentations et commencer le projet que parce que nous avions un sponsoring qui était un sponsoring de ce niveau-là, c’est-à-dire un sponsoring présidentiel avec une promesse politique qui était forte. Vous voyez que ça a pris du temps de partir de la promesse présidentielle pour arriver à 2019 et des expérimentations, parce que nous devions nous assurer que nous avions des préalables qui étaient respectés.

Awad Daniel : Charlène Wampouille, vous étiez chargée du déploiement du programme Procédure Pénale Numérique. Pourquoi les choix d’Amiens et de Blois pour lancer les premières expérimentations en 2019 ?

Charlène Wampouille : Alors, le choix des juridictions expérimentales d’Amiens et de Blois a été fait à la fois parce que l’on savait que l’on avait un appui au moins des chefs de juridictions sur ces ressors, également parce que c’était des juridictions qui a priori n’étaient pas en souffrance au niveau des ressources humaines ou au niveau des stocks, et donc qui allaient pouvoir accueillir de manière peut être plus favorable que d’autres l’arrivée d’un projet de transformation numérique. Nous avons procédé en plusieurs étapes puisque dans un premier temps nous nous sommes rendus dans chacun des deux tribunaux pour rencontrer l’ensemble des services de la chaine pénale où nous avons fait des réunions pour essayer de comprendre comment ils fonctionnaient dans un monde papier et comment ils allaient pouvoir fonctionner dans un monde numérique. Donc en essayant de voir ce qu’il fallait absolument sauvegarder ; qui était indispensable à la fois pour la fluidité dans l’organisation des services mais aussi pour être en accord avec le code de procédure pénale ; et également voir ce qui pouvait être gommé et qui étaient des irritants dans un monde papier, et comment le numérique allait pouvoir éventuellement répondre aux attentes des agents de pouvoir se recentrer sur leur cœur de métier.

Awad Daniel : Haffide Boulakras, qu’est-ce qu’on veut dire exactement par « expérimentation » ?

Haffide Boulakras : Une expérimentation c’est : je prends les outils, je les mets sur le terrain, si empiriquement ça ne fonctionne pas, en fait j’arrête et je prends la responsabilité d’arrêter le projet. A l’inverse, si je vois des leviers qu’il faut simplement modifier pour aller vers un résultat qui est un résultat probant, dans ce cas-là je peux continuer. Je crois que cette maturité a justifié qu’on ait un alignement et des réunions très importantes au sein du ministère pendant quasiment une année.

Awad Daniel : Charlène, vous aviez un rôle véritablement opérationnel sur le terrain auprès des acteurs de ces expérimentations : comment se sont passés ces premiers contacts ?

Charlène Wampouille : La majorité des personnes qui, au quotidien, avaient à gérer la procédure pénale numérique, était de prime abord relativement réticente parce que nous arrivions dans un écosystème technologique et numérique qui était très vieillissant, qui était très dysfonctionnant, et donc les réactions étaient plutôt « essayez déjà de faire en sorte que ce vous nous donnez fonctionne au lieu d’essayer de nous envoyer sur une autre ère pour laquelle nous ne sommes pas prêts ». Heureusement, parmi quand même les agents il y avait des personnes qui étaient en attente de ces évolutions et donc qui ont pu être des relais sur le terrain. Lorsque l’on déploie, il y a les attentistes, ceux qui se disent je ne suis ni pour ni contre et j’attends de voir comment ça se passe ; les réticents qui, avant même que l’on arrive nous disent ça ne va pas marcher, je ne veux pas de ce que vous me donnez ; et ceux qui sont plutôt optimistes et qui attendaient ça avec impatience.

Awad Daniel : Dans ce type de contexte, comment est-ce qu’on arrive à gérer des profils d’agents aussi différents ?

Charlène Wampouille : Il fallait à chaque fois individualiser et prendre en compte les différentes attentes des agents, et je pense que la manière que nous avons eu de les accompagner a été dans un premier temps d’être extrêmement présents sur le terrain. Nous avions des équipes dédiées au déploiement qui n’étaient pas sept jours sur sept en juridiction mais qui étaient là toutes les semaines, deux à trois fois par semaine pour être auprès des agents, pour présenter le dispositif, pour faire des démonstrations au niveau des outils, pour les former et pour les accompagner le jour où on ouvrait le service afin de les rassurer, de leur remontrer comment cela fonctionnait et d’assurer une présence.

Awad Daniel : Haffide, en lumière de ce qu’on vient d’entendre : la formation semble donc être une des clés derrière la réussite du programme ?

Haffide Boulakras : Si je dois pouvoir faciliter le dialogue, en fait je dois pouvoir former les gens et je trouve que c’est jusqu’à présent ce qui faisait défaut. Et l’ENM (l’Ecole Nationale de la Magistrature) est très engagée dans cette action avec la direction des services judiciaires et avec le secrétariat général du ministère. Nous allons notamment à partir du mois de janvier lancer un cycle de spécialisation pour avoir des magistrats qui sont des magistrats chargés de projets et de transformation numérique. Le gros avantage du programme procédure pénale c’est d’avoir fait en sorte que tous les acteurs d’administrations centrales soient dédiés à la réussite de ce programme. Ce qui fait que quand dans un monde numérique les choses ne sont pas conformes à ce qui est écrit dans le code de procédure pénale, nous avons la capacité d’aller vers la direction des affaires criminelles et lui dire « en fait le texte ne correspond pas à la réalité, est-ce qu’il est possible de changer le texte, est-ce que ça correspond aux équilibres du procès ou de la procédure pénale ? » ; et si la direction des affaires criminelles trouve que ça correspond aux équilibres du droit et des garanties offertes par la procédure pénale, et bien la transformation du texte peut se faire, à l’aune de ce que le numérique est capable d’offrir.

Awad Daniel : Charlène, concrètement quel a été l’apport de la procédure pénale numérique ? Est-ce que vous considérez d’ores déjà que le programme est une réussite jusqu’à présent ?

Charlène Wampouille : Nous avons, grâce à la procédure pénale numérique, permis que depuis le dépôt d’une plainte jusqu’à l’exécution d’une peine il n’y ait plus de papier dans le traitement de la chaine judiciaire ; et donc notamment vous pouvez arriver à l’audience avec des juges qui n’ont plus ces gros dossiers sur leur bureau, mais qui vont par leur ordinateur projeter les PV, pouvoir faire une audience en nativement numérique et donc c’est l’abandon du papier.

Haffide Boulakras : Ce qui est génial c’est que le numérique est entrain de changer le droit alors qu’avant (notamment avant le programme procédure pénale numérique), c’était vraiment l’inverse. On a réussi à faire en sorte qu’à chaque fois que l’automatisation du traitement de la procédure était possible, ce soit fait et réalisé ; dans un monde numérique qui n’était pas non plus d’une grande maturité techniquement parlant. Donc je trouve que ce que l’on a réussi à faire à ce titre-là est quand même assez fantastique.

Awad Daniel : C’est quoi la suite alors ? j’imagine qu’il y a encore matière à améliorer cette procédure non ?

Charlène Wampouille : On a encore de grandes perspectives d’évolution puisque la procédure pénale est extrêmement complexe. Elle a des natures et des réalités très diverses en fonction des juridictions, en fonction de la nature de la procédure, des services qui peuvent la traiter, et donc aujourd’hui nous avons fait un grand pas dans la transformation numérique de la chaine pénale mais il nous reste encore de longues étapes à franchir.

Haffide Boulakras : Le grand soir c’est la grande révolution, celle qui permet d’avoir en un point unique une procédure qui est sous un format qu’on pourrait appeler entre nous un format wiki. Ça on n’y est pas encore parce que ça demande des transformations qui sont notamment des transformations d’infrastructures dans les deux ministères et qui sont des transformations d’ampleur.

Awad Daniel : Pour conclure cet épisode, de par votre expérience, de par votre expertise sur le terrain, quels conseils vous donneriez à des porteurs de projets de transfo numérique publique ?

Haffide Boulakras : En réalité, ce qui compte c’est de se poser la question de l’utilité de ce que l’on offre et de faire en sorte que cet objet n’évolue qu’à la condition d’être en dialogue constant avec les utilisateurs. Plutôt que de parler de lieux d’expérimentation, il faudra même parler de lab parce qu’à chaque fois qu’il y a une bonne idée, il faut la mettre dans un univers qui est un univers réel, voir si elle fonctionne, et surtout avoir suffisamment de sponsoring pour avoir la force de dire (ce qui n’est pas évident dans l’administration publique) ; avoir la force de dire « ça ne marche pas, j’ai dépensé de l’argent, j’ai dépensé de l’ETP mais ce n’est pas grave si ça ne marche pas j’arrête cette idée ».

Ce podcast est produit par l’Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.

Awad Daniel : Transformation digitale, transition numérique, ou même quatrième révolution industrielle.

Derrière ces termes, se cache une réalité pour l'ensemble de nos entreprises, de nos administrations et pour chacun d'entre nous. Le numérique dans tous ses États : c'est une série de podcasts que je vous propose pour mieux appréhender la transformation numérique publique, à travers des histoires et des témoignages concrets des agents publics qui la vivent au quotidien.

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Au sein des administrations publiques, le numérique éco-responsable ou sobriété numérique selon le terme que l’on préfère employer, ont pris un poids considérable. Le Colonel Olivier, membre du bureau de la stratégie en charge des questions de sobriété numérique au sein du ministère des Armées et Thierry Lochon, directeur du programme numérique et écologique au sein du ministère de la transition écologique et copilote de la MiNumEco, nous rejoignent aujourd’hui pour en parler.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Colonel Olivier, on évoque beaucoup de termes : « numérique éco-responsable », « sobriété numérique » ; mais au final quel est le terme qui est le plus approprié ?

Colonel Olivier : Aujourd’hui au ministère des Armées on emploie le terme de sobriété numérique. C’est une convention si vous voulez, on se met d’accord pour employer tous le même terme. On n’a pas choisi d’employer le terme éco-responsable, ça aurait très bien pu être le cas mais aujourd’hui on utilise le terme de sobriété numérique. Pour moi, les deux sont équivalents parce qu’en fait la sobriété numérique quand on regarde comment elle s’articule et quels sont les leviers, elle prend vraiment en compte tous les aspects du numérique depuis la conception du matériel jusqu’à la fin d’usage. Donc il s’agit vraiment d’une démarche qui est éco-responsable, qui vise à être éco-responsable sur tout le cycle de vie d’un outil numérique.

Awad Daniel : Thierry Lochon, vous êtes copilote du programme MiNumEco : on a l’impression que la feuille de route gouvernementale de 2019 a été la clé des nombreuses actions entreprises sur les sujets de la sobriété numérique.

Thierry Lochon : Il y avait déjà des actions bien avant que cette mission se mette en place, ou ses actions, ou que la feuille de route gouvernementale soit établie, parce qu’en fait la mission interministérielle numérique et écologique est un peu née de cette construction de la feuille de route gouvernementale et pour accompagner cette feuille de route gouvernementale.

Colonel Olivier : Le ministère des Armées s’inscrit complétement dans la démarche interministérielle de réduction de l’impact environnemental du numérique, donc à ce titre-là nous sommes en prise avec un organisme qui est la direction interministérielle du numérique qui nous a précisé les grands axes de travail. Alors, nous avons 6 axes de travail principaux qui sont : la sensibilisation des agents civils et militaires du ministère ; le secteur des achats ; le secteur de la conception des services numériques ; il y a un sujet également qui est très important sur la sobriété numérique des data center ; enfin les deux derniers sont la phase d’usage et puis la fin d’usage des matériels.

Awad Daniel : Thierry, la MiNumEco (la mission interministérielle numérique éco-responsable) qu’est-ce que c’est concrètement ?

Thierry Lochon : Le premier rôle c’est de porter cette mission. Le deuxième rôle c’est d’animer l’ensemble des ministères pour s’assurer que les ministères mettent en œuvre aussi, et n’ont pas de difficultés dans la mise en œuvre. On porte un petit peu aussi avec l’ADEME un certain nombre de sujets ou en tout cas, on fait bénéficier l’ADEME de notre expérience. Et puis le troisième rôle c’est justement un petit peu ce que l’on a fait au travers de l’outil mesure, mais la MiNumEco avait beaucoup anticipé avant, c’est de proposer des communs qui permettent à l’ensemble des ministères et au-delà, de mettre en œuvre. Donc il y a le guide des achats responsables, il y a un certain nombre de guides sur le site internet de la MiNumEco.

Awad Daniel : Colonel, le ministère des Armées est une entité unique de par ses fonctions sensibles. Comment est-ce qu’on adapte la stratégie gouvernementale aux particularités du ministère ?

Colonel Olivier : A l’instar de peut-être un ou deux autres ministères, nous avons une singularité qui est facile à expliquer, qui est facile à comprendre. Qui fait que pour nous, il y a quand même un impératif de résultats opérationnels qui est fixé, c’est-à-dire que nous sommes tenus d’obtenir, d’atteindre des objectifs opérationnels qui nous sont fixés par les pouvoirs publics, par le niveau politique lorsque l’on est dans une situation de crise ou de conflit. C’est pour ça que la sobriété numérique elle s’applique évidemment à toutes les composantes du ministère des Armées, mais il ne faut pas perdre de vue que le résultat opérationnel est placé quand même en première priorité des objectifs.

Thierry Lochon : D’où la raison pour laquelle normalement chaque ministère devait décliner la feuille de route gouvernementale pour que chacun puisse prendre en compte ses propres spécificités. Et d’où l’intérêt (et ça a été un gros travail de la MiNumEco), d’identifier au sein de chaque ministère un porteur, un correspondant, qui eux justement ajustent les discours généraux et traitent des sujets que je viens de vous évoquer précédemment. C’est-à-dire de dire : « pour mon ministère peut être que je suis plus en retard sur la relation avec le citoyen, donc peut être que j’ai un accent à mettre là-dessus ». Le MINARM et le ministère de l’Intérieur aussi a ses propres spécificités. Ils ont des problématiques de sécurité qui sont là aussi pas toujours compatibles avec l’écologie ; ce n’est pas toujours évident de concilier les deux non plus.

Awad Daniel : Pour rebondir sur vos propos Thierry : qu’est-ce qui a été mis en place au sein de la MiNumEco pour entre guillemets, éduquer les agents publics aux questions de sobriété numérique ?

Thierry Lochon : Ce qui est proposé par la MiNumEco en général c’est du guide générique. On l’a fait encore récemment : on réunit tous les correspondants ou des spécialistes par ministère pour établir des guides, des règles qui soient discutés et qui soient a priori applicables par tout le monde. Mais ça reste des guides génériques et donc quand vous regardez dans le détail, il faut que chacun réadapte ; d’où l’intérêt quand même d’avoir une déclinaison de la feuille de route gouvernementale dans chaque ministère. En termes d’outillage, on commence à voir sur ce site-là un certain nombre d’outils donc je cite le mien, enfin celui que je porte sur la mesure et sur l’évaluation de l’empreinte environnementale du numérique, mais ce n’est pas le seul.

Colonel Olivier : Nous organisons depuis 2022, chaque année, une journée de la sobriété numérique qui s’inscrit dans la semaine européenne du développement durable. Comme d’autres ministères, nous sommes en relation avec des organismes qui assurent deux choses : la réutilisation des matériels qui ne servent plus donc leur réemploi dans des filières d’économie solidaire et quand ce matériel n’est plus utilisé, et bien nous avons des conventions qui nous permettent le recyclage de leurs composantes. Et pour ce qui est de l’usage en général, il y a des travaux aujourd’hui qui visent à réduire globalement le nombre d’imprimantes, réduire l’impact des impressions papier sur l’environnement et allonger la durée de vie des matériels.

Awad Daniel : Selon vous est-ce qu’aujourd’hui les objectifs de sobriété numérique fixés au sein de vos structures respectives ont été atteints ?

Colonel Olivier : Nous avons eu la note interne sur le sujet au premier semestre de cette année et lorsqu’on regarde les résultats, lorsque l’on regarde les initiatives qui sont prises à l’intérieur du ministère des armées par ses grandes composantes, moi j’estime au vu de ces résultats-là, qu’on est dans une dynamique extrêmement fructueuse. Je constate que la sobriété numérique n’est plus quelque chose d’absolument nouveau. Depuis deux ans, il y a un effort d’acculturation qui a été fait aussi bien en direction des usagers comme je vous le disais tout à l’heure, qu’en direction de toute la sphère décisionnelle ; et aujourd’hui la sobriété numérique c’est un sujet qui est compris par les grands dirigeants du ministère et notamment par le chef d’état-major des armées. On cherche d’ici 2025 à obtenir que tous les marchés, ou la quasi-totalité des marchés, comportent des clauses environnementales.

Thierry Lochon : Les objectifs de ce qui est proposé par la MiNumEco, et là le regard et quand même assez positif, et je dirais même très positif ; aujourd’hui les guides qui sont sur le site de la MiNumEco sont globalement tous reconnus. C’est utilisé, c’est utile, donc on peut quand même que se satisfaire, et on n’avait fait un petit bilan ensemble par téléphone, et voilà on portait quand même un regard plutôt positif.

Colonel Olivier : Un conseil, c’est d’aller consulter l’excellente documentation qui est fournie par la direction interministérielle du numérique. Puis j’ai trouvé un conseil, une recommandation qui était intéressante : c’est de se poser les bonnes questions dès le début lorsqu’on envisage de développer un système d’information. C’est quel est exactement son utilité, quelles sont exactement les fonctionnalités que l’on attend, et comment aller le plus directement aux résultats finalement.

Thierry Lochon : Le conseil que je donnerais aujourd’hui c’est vraiment de ne pas tout prendre comme étant des contraintes indépendantes les unes des autres mais d’essayer. Et c’est peut-être d’ailleurs ce qu’il faudra à termes arriver à faire aussi, à proposer aux porteurs de produits ou de projets, c’est d’avoir une synthèse en disant : bah voilà c’est un petit fil conducteur en partant d’un guide, et en disant si vous faites ça, ça vous permet de faire un pas vers la sécurité ou de simplifier vos contraintes de sécurité. Les conseils ils sont multiples, d’ailleurs ce n’est pas qu’un seul conseil que je viens de donner, mais voilà c’est d’essayer d’avoir une vision globale et surtout d’être très simple.

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En 2018, la promulgation de la loi pour un Etat au service d’une société de confiance est venue acter la création du programme « Dites-le-nous une fois ». Au fil de cet épisode, plongeons-nous dans les mécanismes du programme et de manière plus générale sur la relation entre administrations et usagers. Pour en parler, j’ai le plaisir de discuter avec Marion Loustric, cheffe du programme Administration proactive et avec Joffrey Renaux, pilote de l’observatoire « Vos démarches essentielles » entre 2021 et 2023.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Joffrey Renaux, la question de la dématérialisation dans les administrations publiques semble avoir pris son essor à partir de 2017 et le premier mandat du Président Emmanuel Macron. Est-ce que vous pourriez me faire un retour sur son histoire ?

Joffrey Renaux : En 2017, lors des premières élections d’Emmanuel Macron, il y avait eu cette promesse de rendre les services plus accessibles, plus simple d’accès, et surtout de les dématérialiser d’ici fin 2022 à l’époque. Et donc c’était quelque chose qui s’est concrétisé un peu dans le temps. Donc on a mis deux ans à identifier quels seraient les services phares qui devaient être dématérialisés et surtout on s’est dit : dématérialiser c’est une chose mais il faut bien dématérialiser.

Awad Daniel : Cette simplification des services publics elle se retrouve à toutes les échelles des administrations. Marion Loustric, vous êtes directrice du programme Administration proactive : le programme Dites-le-nous une fois semble s’inscrire dans cette dynamique, mais concrètement quel est son rôle ?

Marion Loustric : Dites-le-nous une fois c’est quelque chose qui a été introduit en 2013 dans la loi ESSOC. Le principe est simple de Dites-le-nous une fois, c’est de rendre obligatoire (pour les administrations) la simplification des démarches administratives en évitant de redemander des informations déjà connues. C’est-à-dire qu’une administration n’aura pas le droit de demander une information qui est déjà connue et déjà rendue disponible par une autre administration. Typiquement, votre revenu fiscal de référence est déjà connu par la direction de la DGFiP (la direction générale des Finances publiques), donc une autre administration (la CAF etc.) ne doit pas vous le redemander ; et ça vaut pour les citoyens et pour les entreprises.

Awad Daniel : Mais pour aller plus dans le détail, de quelles démarches est-ce que l’on parle lorsqu’on évoque l’administration proactive ?

Marion Loustric : Nous on classifie les choses en deux catégories : les démarches qu’on doit faire, typiquement renouveler son titre d’identité, déclarer un déménagement, demander une vignette Crit’Air ; et puis celles qui nous ouvrent l’accès à des droits, il y a la demande de RSA, la prime à la conversion, les demandes d’aides à la CAF, la retraite, des tarifs préférentiels dans les transports par exemple pour certaines catégories de population (par exemple les jeunes étudiants) etc. Ce qu’on a constaté et ce qui a été un petit peu la genèse du programme et de ce qu’on fait aujourd’hui, c’était que sur cette seconde catégorie des aides d’Etat, on constate souvent qu’il y a ce qu’on appel du non recours à l’aide. C’est-à-dire que la personne qui a le droit à l’aide ou au tarif préférentiel ne va pas le demander. Pareil, sur les démarches on constate qu’il y a des personnes qui ne vont pas faire les démarches parce qu’elles ne savent pas comment faire ou pour d’autres raisons.

Awad Daniel : Ce taux de non recours dont vous me parlez on l’estime à environ combien de pourcents ? Et est-ce que l’on connait les raisons qui expliquent son importance ?

Marion Loustric : Sur la majorité des aides on estime un taux de non recours à 30%. Il faut savoir quand même que ce taux de non recours est difficile à estimer puisque qu’il varie beaucoup d’une démarche à l’autre, et surtout parce que l’on ne connait pas les personnes qui ne demandent pas l’aide. Donc les raisons pour lesquelles on a ces 30% de non recours c’est le manque d’informations sur des aides, sur l’existence même de l’aide.

Awad Daniel : Joffrey, vous étiez pilote de l’observatoire Vos démarches essentielles (qui est complémentaire à l’administration proactive) jusqu’en 2023 : Quel est donc le rôle de l’observatoire concrètement ?

Joffrey Renaux : C’est un observatoire qui va regarder tous les trois mois et qui va publier selon cinq indicateurs phares la qualité d’un service public. Donc les indicateurs qu’on regarde c’est : est-ce que le service est réalisable en ligne ; est-ce que les usagers sont satisfaits (donc on a bouton « je donne mon avis » que vous pouvez voir sur plus de trois mille démarches, d’ailleurs au-delà même de l’observatoire où on va poser une question « est-ce que la démarche s’est bien passée pour vous ? ») ; ensuite on va essayer de qualifier pour comprendre ce qui pourrait être amélioré, donc on regarde cet indicateur de la satisfaction usager qui est excessivement important ; on regarde aussi est-ce qu’un service est accessible aux personnes en situation de handicap ; on regarde aussi pour chacun des services si le Dites-le-nous une fois est bien appliqué ; et on regarde aussi un cinquième indicateur qui est le taux de recours au service en ligne, et là l’idée c’est lorsqu’on a un faible taux de recours à un service en ligne, c’est d’aller investiguer et de comprendre pourquoi est-ce que les gens ne le réalisent pas en ligne.

Awad Daniel : Justement, de votre perspective est-ce qu’il y a des points sur lesquels la France doit progresser ?

Joffrey Renaux : Complètement ! Alors, en gros l’indicateur sur lequel la France malheureusement est assez en retard, c’est notamment l’accessibilité numérique. Voilà, ça fait plus de dix ans que tous les services publics numériques devraient être 100% accessibles et dans les faits on en est encore loin. Tous les 3 mois on a de nouvelles démarches et de nouveaux services qui passent au vert sur ce critère.

Awad Daniel : Marion Loustric, il y a un mot qui revient souvent depuis le début de cet épisode, c’est la simplification. En quelque sorte c’est le mot d’ordre du Dites-le-nous une fois ?

Marion Loustric : Exactement, en fait avec le programme Dites-le-nous une fois on est vraiment sur de la simplification, donc on lutte contre la complexité des démarches. Et ce qu’on essaye de mettre en place depuis 2021 sur l’administration proactive ou le dites-le-nous zéro fois, c’est de notifier les usagers, les citoyens ou les entreprises de leur éligibilité à une aide ; de leur rappeler les démarches à réaliser ; de leur fournir les informations nécessaires dans un premier temps ; et dans un second temps d’automatiser l’attribution des droits et la réalisation des démarches.

Awad Daniel : Il y a quand même une grosse question qui se pose en lumière de ce que vous venez de m’expliquer : la protection des données des usagers est probablement une question centrale aujourd’hui ?

Marion Loustric : Les administrations ont très à cœur le respect du droit des usagers et le respect de sa vie personnelle et de ses données personnelles, et donc forcément quand on va leur demander de partager des données il y a une peur, et moi je suis très contente que cette peur existe parce que ça nous garantit quand même notre sécurité en tant que citoyen. Maintenant, on rend ça possible dans un cadre très sécurisé, avec des échanges de données très sécurisés, et des règles très précises et techniques pour faire en sorte que ce soit sécurisé, et ça il faut qu’on l’accompagne.

Awad Daniel : Vous venez parler de Dites-le-nous zéro fois, d’automatisation ; en fait après l’étape de simplification, l’étape finale c’est d’automatiser systématiquement les démarches administratives j’imagine ? Est-ce qu’il y a déjà des avancées sur ce plan ?

Marion Loustric : Là où on est allé au bout de la démarche et on a automatisé l’envoi ça pourrait être le chèque énergie. Ou pour une annonce plus récente (donc quelque chose qui va être fait dans les prochaines années à la rentrée 2024), ce sont les bourses pour les collégiens et les lycéens qui seront attribuées automatiquement aux familles éligibles.

Awad Daniel : Donc l’automatisation totale de l’attribution des aides, on peut dire que c’est une perspective encore lointaine en fin de compte ?

Marion Loustric : Non, là c’est vraiment un objectif encore lointain. Là, nous on pose les bases à ce que des administrations puissent le faire si elles le souhaitent. Déjà c’est vraiment le prérequis. L’automatisation totale des aides ce n’est pas pour tout de suite, on avance au fil de l’eau, on avance en marchant.

Awad Daniel : Pour finir et pour conclure cet épisode, j’aurais aimé avoir votre perspective respective : Joffrey et Marion, c’est quoi pour vous la clé pour réussir un projet de transformation numérique publique aujourd’hui ?

Joffrey Renaux : Il est important de ne pas hésiter si vous avez des thématiques sur le cloud, sur l’accessibilité numérique, sur la satisfaction usager, sur la conduite de tests utilisateur ; de ne pas hésiter à contacter la brigade d’intervention numérique.

Marion Loustric : La clé c’est vraiment d’avoir un projet à part entière. De prendre le temps aussi, d’expérimenter, d’avoir ensuite une phase de passage à l’échelle, d’apprentissage etc. Et surtout, d’en faire un projet qui ne soit pas que numérique. De préférence dès le début, dès la phase d’expérimentation, et donc de commencer dès le début du projet à travailler sur la communication avec les usagers ; de savoir qui on va contacter, comment ; de réfléchir aux enjeux techniques, aux données dont on a besoin mais pas que ; et vraiment d’embarquer tout ce dont on a parlé aujourd’hui dès le début du projet c’est vraiment important.

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Au niveau local que ce soit pour améliorer la communication avec les citoyens, optimiser les processus internes, ou même favoriser l’innovation, chaque collectivité territoriale à ses propres objectifs et aspirations en termes de transformation numérique.

Caroline Zorn, vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg, conseillère municipale de Strasbourg et en charge de la délégation « enseignement supérieur recherche et innovation, industrie culturelle créative et numérique » ; ainsi que Maria Cotora, directrice du programme transformation numérique des territoires, viennent lever le voile sur ces questions.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Caroline Zorn, merci de participer à ce podcast. Tout d’abord, qu’est ce qui fait de Strasbourg une Eurométropole particulièrement sensible aux questions de transformation numérique ?

Caroline Zorn : Strasbourg de longue date a vraiment des perles dans son administration. Dans un paquebot quand même de pas loin de 8 000 agents qui ont l’habitude de mener des transformations, la transformation numérique pour autant doit être portée politiquement, et la première chose a été de faire une bascule vers une vraie délégation au numérique. Donc moi j’ai la chance, on m’a fait confiance sur ce point, je suis vice-présidente au numérique donc j’ai ça dans ma délégation. Je ne suis pas présidente déléguée rattachée à un autre vice-président. Voilà, une vraie délégation qui est lisible est qui est claire avec une vraie feuille de route. Donc ça déjà c’est important pour pouvoir mener une transformation.

Awad Daniel : Maria Cotora, cette transformation numérique des collectivités est aidée par le programme TNT (Transformation Numérique des Territoires), qu’est-ce que ce programme exactement ?

Maria Cotora : C’est un programme de collaboration, de dialogue entre l’Etat et les collectivités qui a été lancé en 2021 pour trois ans donc jusqu’en mai 2024. Il y a sans doute une possibilité de le renouveler donc il ne va pas s’arrêter là, mais son esprit est de permettre aux différentes instances de l’Etat et des collectivités, de travailler de concert sur les différents enjeux de la transformation numérique. La première mission c’est de construire avec les collectivités territoriales, des outils d’accompagnement pour leur permettre de mener les différentes transformations ou les différents chantiers qu’ils auraient à mener dans leur collectivité. La deuxième elle consiste vraiment à être une sorte d’interface Etat/collectivités (humaine parce que ce n’est pas un programme complétement automatisé) ; mais on aime bien ce terme d’interface parce que ça désigne vraiment ce pont qu’on met entre les différentes directions de l’Etat et l’ensemble des collectivités territoriales.

Awad Daniel : Caroline, parlons de ces collectivités territoriales au sens large : pourquoi y a-t-il aujourd’hui un besoin important de transformation numérique dans ces territoires ?

Caroline Zorn : Du côté des collectivités territoriales on est plus en retard en réalité que vis-à-vis des administrations centrales, et je suis toujours jalouse de constater que dans certains ministères les outils libres ne posent aucun souci, qu’il y a une culture notamment du logiciel libre qui est beaucoup plus développée que dans les collectivités territoriales. Les collectivités territoriales locales sont beaucoup plus dépendantes des élus en termes de vision et donc si je prends une ville, globalement il y a quand même ce point commun (quel que soit la taille des collectivités), c’est que l’administration tous les six ans change de politique.

Maria Cotora : Je ne sais pas si c’est si vrai que ça pour toutes les directions ministérielles, je pense que c’est très varié en fonction des ministères et des moyens d’un ministère à l’autre. Il y a des très gros ministères qui disposent de ressources numériques et humaines très importantes, d’autres moins ; et au sein de chaque ministère chaque direction n’a pas le même niveau de maturité. Effectivement, là où il y a peut-être une avance de l’Etat par rapport aux collectivités, c’est qu’il y a pour l’Etat la Dinum qui produit un certain nombre d’outils interministériels qui sont donc mis à la disposition de l’ensemble des ministères. Ça ne veut pas dire qu’ils sont déployés dans tous les ministères parce qu’après, charge à chaque ministère de choisir s’il utilise ces outils ou pas.

Awad Daniel : Caroline, à Strasbourg quelle stratégie avez-vous décidé de mettre en place afin de mener à bien vos objectifs de transfo numérique ?

Caroline Zorn : Lors de ce début de mandat on arrivait à un moment où on ne parlait pas de numérique responsable, on parlait de sobriété numérique. Et pendant le Covid donc, et bien nos étudiants devaient suivre des cours sur leur téléphone tout en trouvant à manger parce qu’ils en étaient à avoir des paniers alimentaires. Autant vous dire que je n’allais pas leur causer de logiciels libres, de sobriété numérique etc. Mais aussi, on n’arrivera pas à faire passer ces messages ; et puis ce serait même injuste de faire peser le poids de cette sobriété sur des personnes qui sont parfois éloignées du numérique. Et donc on a créé comme ça une stratégie de transformation de l’administration, une stratégie de déploiement du numérique responsable dans la collectivité (mais aussi avec tous les acteurs avec lesquels on travaille) qui suit trois axes : sobriété numérique (premier axe) ; deuxième axe : solidarité numérique ; et troisième axe : liberté numérique. Parce que je suis quand même très attachée à ce que le numérique continue à raisonner comme une expression de la liberté et de l’autonomie des personnes.

Awad Daniel : Comment est-ce que cette transformation numérique se traduit au quotidien ?

Caroline Zorn : Au quotidien c’est un travail de l’administration que de faire savoir ce que l’on porte politiquement et de le découler opérationnellement. Donc ça peut être des choses très concrètes comme des moments de collaboration focus sur « on nettoie nos boîtes ». Et il n’y a pas que la sobriété numérique quand vous nettoyer vos mails, il y a aussi cette charge mentale qui permet parfois de s’évaporer un tout petit peu, et il y a le travail avec les collègues sur la transmission d’informations, l’arborescence, le coté archivistique aussi avec travailler les arborescences dans ses dossiers de travail ; donc il y a plusieurs bienfaits. On a la fresque du numérique qu’on essaye de faire faire si possible aux agentes et aux agents, et d’ailleurs on les a invités lors de la semaine européenne du numérique responsable à prendre ce temps pour venir faire la fresque du numérique.

Awad Daniel : Maria, comment est-ce qu’on mène à bien cet accompagnement des collectivités territoriales dans leur transformation numérique ?

Maria Cotora : Notre objectif est de pouvoir construire des outils d’accompagnement pour accompagner pas à pas les différentes collectivités mais qu’elles puissent aussi le faire de manière autonome. C’est ce qu’on essaye effectivement de faire dans le programme TNT en mettant autour de la table à la fois les représentants des différentes collectivités, leur structure de mutualisation, le programme TNT (qui du coup peut arriver aussi avec les outils développés par la Dinum pour l’Etat, et voir comment est-ce qu’on peut les mutualiser avec les collectivités), et puis l’Agence nationale de cohésion des territoires qui a un incubateur des territoires et donc développe un certain nombre de produits qui ont vocation à pouvoir être déployés sur toutes les collectivités. Bref, ces différents acteurs là, ensemble on peut essayer de porter le même type de mutualisation et de support à l’ensemble des collectivités dans un rapport un peu différent de la Dinum vis-à-vis des ministères.

Awad Daniel : Caroline, quel regard est-ce que vous portez sur le soutien du programme TNT ?

Caroline Zorn : Moi je les remercie de leur travail. Vraiment ça je le répète parce que la transformation numérique des territoires elle passe par le fait d’avoir des lignes communes. Les élus et puis aussi les cadres des administrations françaises fonctionnent beaucoup par réseau pour se supporter les uns les autres à prendre des bonnes initiatives de chacun/chacune, donc c’est vraiment important de travailler en réseau et on a quand même besoin de ces signaux de l’Etat pour vraiment se sentir appuyé et dans la bonne veine. Et donc de rassembler tous les acteurs publics de l’Etat, les associations d’élus, et de faire en sorte qu’il y ait un portage politique commun et fort c’est vraiment, vraiment important.

Awad Daniel : Avant de finir ce podcast j’aimerais avoir vos points de vue respectifs : quels conseils est-ce que vous donneriez à des porteurs de projets de transformation numérique publique ?

Maria Cotora :Si on veut arriver à réussir sa transformation numérique il faut vraiment que ce soit porté de manière transverse sur l’ensemble des sujets. Donc ça veut dire un niveau de portage au niveau décisionnel (soit au niveau du DGS ou même de la direction politique de la collectivité) ; il faut un vrai portage politique et puis un vrai lien, une articulation entre les profils numériques de la collectivité et les directions métier.

Caroline Zorn : Mon message c’est vraiment de miser fort et de miser loin sur l’éducation populaire au numérique parce que c’est une matière qui n’était pas enseignée aux enseignants de nos enfants aujourd’hui. C’est quand même quelque chose de neuf : il n’est pas évident pour tout le monde de distinguer l’informatique, du numérique, des usages du numérique et donc tout ça est un peu nouveau même si notre quotidien est baigné par ces équipements. Donc il faut vraiment miser à fond sur l’éducation de toutes et tous au numérique. Voilà donc j’espère que ce message sera entendu partout.

Ce podcast est produit par l’Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.

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Je suis Awad Daniel : suivez-moi et entrons dans le monde numérique.

Cela fait déjà plusieurs années que le numérique s’est imposé comme outil pédagogique et méthode d’enseignement, et aujourd’hui son efficacité n’est plus à prouver. Les plateformes de formation en ligne et ressources diverses sont aujourd’hui légion. Mais à quoi ressemble cette révolution numérique de la formation au sein des administrations publiques ? Quelles innovations ont été mises en place ? et quel défi reste à relever pour accompagner la montée en compétence des agents publics ?

Génaël Valet, directeur du programme interministériel de formation Mentor et Stéphane Foltzer, directeur de l’Académie du numérique de la défense, sont avec moi pour partager leur expertise sur ces questions.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Génaël, Stéphane, pour introduire le sujet à ceux qui nous écoutent : quel regard est-ce que vous portez sur la culture numérique au sein des administrations publiques ?

Génaël Valet : Alors, la culture numérique c’est vraiment un sujet qui est au cœur de la problématique parce qu’au hasard des expériences, on a constaté un écart assez important entre des acteurs qui sont super aculturés à ces questions numériques, qui sont à l’aise avec les outils ; et puis les autres qui ont un peu plus de mal à s’y mettre. Et c’est vrai que du coup l’écart se creuse et ça nécessite vraiment une réflexion profonde autour de la création de service numérique parce qu’on ne peut pas considérer que parce qu’on va mettre en place un service numérique, il va être adopté tout de suite par l’ensemble de la population.

Stéphane Foltzer : Je pense qu’on passe très rapidement d’une culture numérique assez traditionnelle et bureautique à une culture beaucoup plus diversifiée dans les outils que l’on utilise au quotidien. Donc tout ça ça fait énormément de nouveautés en une période courte et avec une grande difficulté : c’est celle de la souveraineté numérique qui fait qu’aujourd’hui on se doit d’utiliser des outils sécurisés au juste niveau.

Awad Daniel : Rentrons plus en détail sur le sujet de la formation : comment est-ce que son lien avec le numérique a changé au cours de ces dernières années ?

Stéphane Foltzer : Le numérique au service de la formation, de l’apprentissage, c’est quelque chose qui, depuis longtemps fait partie des modalités pédagogiques qu’on offre à nos agents apprenants. Ce qui change depuis quelque temps c’est la variété, l’hybridation on va dire, des modalités pédagogiques qui font qu’on a plus seulement une plateforme Learning management system qui stock et qui diffuse du contenu pédagogique ; on a de plus en plus une offre multimodale qui a une grande qualité pédagogique et en termes d’ingénierie de formation.

Awad Daniel : Génaël, la plateforme Mentor a été lancée en 2021 après plusieurs années de travail : quelles réflexions ont menées à la création du projet ?

Génaël Valet : La question qui s’est posée notamment après la période Covid, c’est qu’on avait toujours assez de difficultés à trouver des formations qui correspondaient à ses besoins. On avait encore plus de difficultés pour trouver du temps pour se former en fait. Et c’est vrai que c’est un petit peu ce qui a été la genèse du projet : c’est d’essayer de fournir effectivement une offre de formation libre accès qui puisse être accessible en tout temps, en tout lieu, et qui permette vraiment à l’agent public de pouvoir bénéficier de cette offre.

Awad Daniel : Et donc maintenant nous sommes en 2023 : Qu’est-ce que Mentor aujourd’hui ?

Génaël Valet : C’est une plateforme de formation en ligne pour les agents de la fonction publique d’Etat, dans laquelle on leur propose une offre en libre accès sur un ensemble de thématiques dites transverses, dans lesquelles on va retrouver par exemple le numérique (c’est le sujet du jour), mais aussi les questions juridiques, administratives, les achats, les finances publiques, la transition écologique... Mais la particularité de Mentor c’est que les ministères et les administrations partenaires vont également pouvoir opérer de la formation sur leur propre espace dédié qui est réservé à leurs agents, et là vont toucher des domaines spécifiques dit « métiers ». Donc au final, un agent sur mentor il va retrouver l’offre qui va être constituée à la fois de ces formations transverses (donc communes à tous les agents), mais aussi des formations spécifiques en fonction de son administration d’origine.

Awad Daniel : Pour aller un peu plus loin et pour se projeter : dans les mois à venir quels objectifs est-ce que vous visez ?

Génaël Valet : Dans les prochains mois, c’est d’embarquer l’ensemble des agents de la fonction publique avec un passage à l’échelle. D’ailleurs qui a été anticipé notamment avec un plan de scalabilité (puisqu’on parle du numérique autant y aller) ; un plan de scalabilité sur la plateforme qui pourrait être activé à tout moment pour justement faire face à cette massification qui est attendue.

Awad Daniel : Stéphane, vous êtes directeur de l’Académie du numérique de la défense, à son lancement quels étaient vos objectifs ?

Stéphane Foltzer : Aujourd’hui l’Académie du numérique a trois petites années d’existence donc on était vraiment dans un model expérimental, exploratoire, et on avait plus des objectifs qualitatifs que quantitatifs. Il y avait d’une part ce continuum d’apprentissage qu’on a évoqué là ; et il y a un autre objectif que l’on porte depuis longtemps : c’est une dynamique qui vise à promouvoir la production en interne de contenu par des enregistrements de capsules e-learning un peu plus digestes, en tout cas qui permettent de mieux comprendre le fonctionnement de ce que l’on veut pousser.

Awad Daniel : Justement, qu’est-ce que vous cherchez à pousser avec l’Académie ?

Stéphane Foltzer : En amont, on va pouvoir éditorialiser la formation de telle sorte à pouvoir petit à petit (comme on fait en marketing digital sur des modèles économiques plus orientés profit on va dire) chercher à capter l’intérêt d’agents qui a priori ne sont pas spécialement appétents sur ces questions du numérique. Et en aval, le numérique apporte sur le plan d’ingénierie de formation un gros intérêt : c’est la continuité après la période de formation formelle et l’accompagnement dans le transfert des connaissances théoriques. L’intérêt est de pouvoir travailler sur de la reconversion interne, notamment sur des métiers en forte tension où on a du mal à recruter.

Awad Daniel : Génaël, vous parliez un peu plus tôt de laisser la main aux ministères, de leur permettre de publier leur propre contenu : c’est l’une des raisons d’être de Mentor selon vous ?

Génaël Valet : Alors, ça c’est une question vraiment très importante et c’est un des ingrédients finalement de la recette qui marche, qui réussit. C’est bien l’objectif du programme Mentor : c’est de laisser aux acteurs une capacité d’initiative, une marge de manœuvre, et d’ailleurs sur mentor les ministères, les administrations sont libres de publier des nouvelles formations ; ce qui ne les dispense pas de respecter un cadre qu’on a d’ailleurs coconstruit ensemble. L’idée c’est vraiment de le construire ensemble et c’est d’ailleurs sur ce principe qu’est née la fameuse stratégie éditoriale dont je parlais et qui va définir un certain nombre de principes et d’attendus sur les publications qui viennent alimenter l’offre. C’est une sorte de manifeste commun en fait, sur ce qu’est une formation en ligne aujourd’hui et ce qu’elle devrait contenir.

Awad Daniel : Que diriez-vous aux agents publics et ministères pour qu’ils utilisent Mentor de manière plus systématique ?

Génaël Valet : Là où Mentor a une vraie plus-value, c’est que toutes ces formations-là (pour un ministère qui a une obligation de former ses agents), et bien cette offre elle est là, elle est disponible, ils viennent l’alimenter, ils viennent participer et donc c’est cette richesse en fait, cette diversité des sujets et des manières de les traiter qui font que Mentor est un levier et une réponse.

Awad Daniel : Pour finir notre épisode, quels conseils est-ce que vous donneriez à des porteurs de projets de transformation numérique publique ?

Stéphane Foltzer : Je pourrais leur conseiller d’être centré sur l’utilisateur, d’adopter des approches agiles quand c’est pertinent, sans dogmatisme.

Génaël Valet : Je dirais que le premier ingrédient pour moi c’est le temps. C’est-à-dire que lorsqu’on est dans un projet de transformation numérique, il faut laisser du temps aux organisations pour appréhender la transformation. L’autre ingrédient c’est qu’il faut construire un projet autour de valeurs qui font qu’on partage un fond d’entente, une vision, un objectif commun. Un autre ingrédient qui me semble quand même assez important et on n’en a pas beaucoup parlé jusqu’à présent, mais c’est la solution technique évidemment. Puisqu’on parle de projet numérique, c’est une solution technique qui doit être irréprochable évidemment ; Qui doit être à l’état de l’art, qui doit être suffisamment séduisante pour emporter l’adhésion des organisations. Et puis dernier ingrédient, mais j’en ai déjà un peu parlé, c’est le cadre de confiance et le fait de ne pas vouloir tout contrôler, voilà, ça ça me parait quand même un des ingrédients essentiels.

Ce podcast est produit par l’Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.

Awad Daniel : Transformation digitale, transition numérique, ou même quatrième révolution industrielle.

Derrière ces termes, se cache une réalité pour l'ensemble de nos entreprises, de nos administrations et pour chacun d'entre nous. Le numérique dans tous ses États : c'est une série de podcasts que je vous propose pour mieux appréhender la transformation numérique publique, à travers des histoires et des témoignages concrets des agents publics qui la vivent au quotidien.

Je suis Awad Daniel : suivez-moi et entrons dans le monde numérique.

Dans le domaine de la mobilité, l’open data possède plusieurs avantages : faciliter le déplacement des usagers en leur proposant des informations actualisées en temps réel, mais surtout rendre les transports en commun plus accessibles et plus pratiques que d’autres solutions plus polluantes. Dans cet épisode, Romain Tales en charge des sujets de transformation numérique au sein de Numéricité, et Antoine Augusti, ingénieur pour la plateforme transport.data.gouv.fr, viennent nous apporter leurs éclairages sur ces questions.

Le numérique dans tous ses Etats.

Awad Daniel : Pour commencer cet épisode, parlez-moi du lien qui unit le numérique au sujet de la mobilité.

Antoine Augusti : Dans mon domaine d’activité (la mobilité) le numérique il est évident. Je pense que vous ne savez pas du tout vous déplacer sans utiliser un ordinateur ou un téléphone etc. et quand vous achetez vos billets de train, d’avion, de bus ou de voiture de location, et bien vous le faites à chaque fois en ligne donc c’est évident que le numérique a une place très importante dans tout ça.

Romain Tales : Entre le moment où j’ai commencé à travailler sur les questions d’ouverture des données en 2011 et aujourd’hui, il y a quand même eu énormément de changements, d’évolutions. Je pense qu’il y a eu un changement culturel, c’est-à-dire que le numérique est beaucoup moins considéré comme un gadget et un joujou comme certains acteurs pouvaient le penser il y a quelques années. Donc on voit que le numérique est maintenant considéré comme un sujet à part entière et même comme une politique publique à part entière par le gouvernement.

Awad Daniel : Et donc dans ce contexte, qu’est-ce que la définition de l’open data ?

Antoine Augusti : Je pense que l’open data dans la mobilité elle trouve sa genèse dans la complexité de l’offre. Enfin vous voyez, il y a pleins de manières de se déplacer que ce soit en vélo, en vélo en libre-service, en covoiturage, en train, en bus, les entreprises privées, les entreprises publiques ; tout ça c’est très différent d’un territoire à l’autre et donc ça requiert de partager des données pour avoir l’information la plus complète et pour prendre les meilleures dispositions. Je pense qu’il y a deux aspects à l’open data : il y a l’aspect transparence de l’action publique donc de dire : l’administration fait des choses pour les citoyens, pour les entreprises etc. et il faut rendre compte de cette activité ; et l’open data c’est aussi valoriser des données donc c’est mettre à disposition des données pour que ce soit utile aux entreprises, aux citoyens, aux associations, aux administrations, donc ça va être des données, des adresses de cadastre, de transport, de météo etc.

Romain Tales : Le concept fondamental c’est de mettre à disposition au plus grand nombre, des données qui ne sont pas protégées par des secrets. J’insiste sur cette notion parce qu’il y a des données qui n’ont pas vocation à être mises en open data, qui contiennent des données à caractère personnel et qui sont protégées par des secrets légaux. Mais en tout cas, on s’est assez rapidement rendu compte que : que ce soit du côté des entreprises, des associations, de la société civile en générale, mais aussi des administrations (qui étaient finalement les premières réutilisatrices des données disponibles en open data), on s’est rendu compte que ça représentait un vecteur d’innovation et d’amélioration des politiques publiques énorme.

Awad Daniel : Au sein des administrations, cette question de l’open data et de la mobilité a été prise en main à travers la plateforme transport.data.gouv.fr, mais qu’est-ce que c’est concrètement Antoine ?

Antoine Augusti : Transport.gouv c’est le point d’accès national des données de transport donc son champ d’action est vraiment très large, on traite toute information qui est utile aux voyageurs sur tous les différents modes de transports. Donc on va retrouver des horaires de bus, de train, des données sur les vélos en libre-service, des zones à faible émission, des données sur le covoiturage, sur l’aménagement cyclable, sur le stationnement vélo, sur les parkings relais… Toutes ces informations qui nous permettent de se déplacer, donc vraiment tous les différents modes de transport, que ce soit sur terre, en mer, dans l’air. Vraiment il existe tout, et tous les modes de transport qui arrivent depuis quelques années donc les trottinettes, les vélos en libre-service. Nous on est en charge d’expliquer la réglementation à chacun donc ça va être les collectivités, les métropoles, les régions, les départements, les villes, mais également les entreprises privées donc ça va être la SNCF, Air-France, BlaBlaCar, Flixbus, etc.

Romain Tales : Transport.data.gouv.fr c’est un produit que j’ai vu naitre puisqu’il est né au sein d’Etalab donc j’ai beaucoup d’affection pour se produit. Et il est né effectivement de la prise en compte du fait qu’il était nécessaire parfois, de créer ce que nous à l’époque on appelait des « verticales », en tout cas des produits qui permettent d’agréger des données sur un point d’entrée unique afin de répondre à des besoins exprimés par une communauté d’acteurs.

Awad Daniel : Antoine, pour aller un peu plus loin : comment est-ce que la plateforme fonctionne en tandem avec les acteurs privés et publics de la mobilité ?

Antoine Augusti : Chacun de ces acteurs (que ce soit privé ou public) à l’obligation de publier ses données dès lors qu’il exploite un service de mobilité et donc là on va travailler avec ces personnes pour qu’elles publient des données de bonne qualité, qu’elles les mettent à jour. Et on va travailler ensuite avec ses réutilisateurs donc ça peut être des applications grand public, donc ça va être MyBus, Google, Mappy, Apple, Citymapper, transit…

Là maintenant sur la plateforme, les données de chacun peuvent être disponibles et elles le sont, elles sont utilisées donc vous allez trouver des données côte à côte de Paris, de Lyon ou de Marseille ; mais il y a également de plus petites villes, par exemple dans ma région : Dole, Vesoul, Besançon (en région de bourgogne), et toutes ces données elles sont disponibles, elles sont de bonne qualité et elles sont présentes sur Google Maps grâce à notre action. Donc effectivement, on a déjà entendu plusieurs fois des services nous dire « bah voilà on a constaté une augmentation de la fréquentation de notre service depuis que c’est disponible » parce que les gens ils ont vraiment l’habitude d’utiliser des applications grand public et là ils découvrent des solutions de mobilité qui sont mises en œuvre, donc du réseau urbain dans les villes ou même interurbain entre grandes villes.

Awad Daniel : Romain, en quoi la loi LOM (loi d’orientation des mobilités) votée en 2019, a permis de clarifier les champs d’action de chacun et de faciliter la démocratisation de l’open data dans les transports ?

Romain Tales : Pour moi la question de la gouvernance elle est cœur parce qu’aujourd’hui la manière dont ça fonctionne c’est qu’avant l’entrée en vigueur de la LOM, les autorités organisatrices de mobilité avaient l’obligation d’organiser dans leur ressort territorial, des services réguliers de transport public de personnes (urbains ou non urbains) ; et elles devaient aussi par ailleurs, travailler sur le développement des modes de déplacement divers et variés pour permettre le développement des sujets de mobilité sur un territoire. Après la LOM, la région a clairement été identifiée comme l’autorité compétente pour organiser les services de transport d’intérêt régional, à la fois sur la dimension routière et ferroviaire. Donc pour moi, le fait que la région soit clairement identifiée comme autorité organisatrice de mobilité, permet de clarifier un petit peu les règles du jeu et d’avoir un mode d’action qui soit le même pour l’ensemble des territoires français ; et ensuite il y a la manière dont ça va se décliner à l’échelle des différents territoires. Mais au moins, je pense que le fait qu’il y ait un chef d’orchestre au niveau régional qui chapote et qui organise tout le dispositif de mobilité à l’échelle d’un territoire donné, c’est un prérequis qui n’existait pas avant et qui aujourd’hui est le même pour l’ensemble des régions.

Awad Daniel : Quel regard est-ce que vous portez sur l’évolution de la plateforme ces dernières années mais aussi sur les futurs enjeux de la mobilité ?

Antoine Augusti : Ça fait plusieurs années qu’on travaille dessus et maintenant on progresse. Là on va dire qu’on arrive à un point où on est plutôt mature sur les données de transport en commun : on arrive à près de 400 jeux de données pour les transports en commun et la qualité est meilleure d’année en année. Je pense que le temps réel est vraiment compliqué à mettre en œuvre parce que pour les horaires de bus on va dire qu’on a une vision sur 3 ou 4 mois ; là le temps réel on demande aux gens de mettre les dispositions qui vont changer toutes les 10 ou 15 secondes donc ce n’est pas le même enjeu, il faut déployer du matériel sur du bus, sur du tram etc. Évidemment, pour diffuser toutes ces informations en temps réel, il faut qu’elles soient fiables. Et après sur les bornes de recharge des véhicules électriques c’est pareil, c’est mis en place depuis quelques années donc savoir où est-ce qu’elles sont, est ce qu’elles sont disponibles, est-ce qu’elles sont utilisées actuellement c’est un enjeu.

Romain Tales : Je pense que sur les sujets de mobilité il y a aussi une vraie question de planification, d’organisation et pourquoi pas même de pouvoir partir au bon moment afin de pouvoir se prémunir de situations particulières qui pourraient arriver sur les réseaux de transport à un instant t, et surtout sur un territoire donné. Il y a ce qu’on appelle les mobilités douces qui se développent de manière assez significative, il y a le développement d’un certain nombre d’infrastructures dans les grandes métropoles et même dans d’autres territoires qui sont développés. On peut se poser la question effectivement d’une meilleure utilisation des mobilités douces afin d’essayer d’avoir un transport plus décarboné que celui qu’on a aujourd’hui.

Awad Daniel : Pour conclure cet épisode j’aimerais avoir votre perspective : quels conseils donneriez-vous à des porteurs de projets de transformation numérique publique ?

Antoine Augusti : De croire à votre projet, de travailler dur, d’expliquer aux gens pourquoi est-ce qu’on fait ça, et de ne pas oublier qu’on ne fait pas du numérique pour faire du numérique : on fait du numérique pour servir des politiques publiques, servir quelque chose dans la vraie vie ; donc de se rappeler quel est le problème qu’on résout ; quel est l’impact sur les gens, sur l’entreprise, sur les personnes, sur l’administration ; et de ne pas perdre cette boussole.

Romain Tales : Si vous transformez le numérique public, je pense qu’il faut vraiment qu’on se pose la question des irritants et des problèmes qui sont rencontrés par les usagers et les agents afin de pouvoir tirer tout le potentiel des données puisque la donnée reste uniquement un outil au service des politiques publiques mais ce n’est pas non plus l’alpha et l’oméga : c’est un moyen. Donc notre vraie valeur ajoutée c’est surtout de pouvoir identifier les bons problèmes qui sont les plus gros poils à gratter pour ensuite pouvoir apporter des solutions qui soient les plus adaptées possible.

Ce podcast est produit par l’Académie du Numérique de la Défense en collaboration avec la direction interministérielle du numérique. Si vous aussi vous voulez devenir acteur de la transformation numérique dans la sphère publique, consultez nos sites civils de la défense et Campus du numérique public.